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20.02.2009

Le XXIème siècle ne pourrait-il pas être le siècle du post-colonialisme ?

mapmonde.jpgPlutôt que de conserver La Garenne-Colombes dans le formol ou "le Pétain", comme vous voudrez et cela pour le siècle à venir avec un collège au nom de Kleber Haedens ne pourrait-on pas décider collectivement d'aider les anciennes colonies à ENFIN recouvrer toute leur dignité en honnorant ici des écrivains dignes de ce nom et dont la France devrait être fière :

de véritables personnalités comme Aimé Césaire (le martiniquais), Léopold Sedar Senghor (le sénégalais) ou Pham Duy Khiêm (le vietnamien) qui furent de formidables écrivains mais aussi des personnalités politiques, tous au minimum agrégés de grammaire ou de littérature française. Ces trois là, par exemple ne sirotaient pas des Vichy-menthe à Lyon pendant la guerre comme Haedens et respectaient, eux, plus que tout la République, la langue française, la diversité et surtout le métier de professeur. Je rêve d'une ville hospitalière, d'une ville progressiste, d'une ville de culture plutôt que d'une ville aux deux pieds dans le Pétain.

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Pham Duy Khiêm, Georges Pompidou et Léopold Sedar Senghor en khâgne au lycée Louis-le-Grand (1931).
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Senghor participe avec Césaire au redressement du journal des étudiants martiniquais, l’Étudiant noir et se penche sur le problème des rapports entre les deux blocs ethniques. Senghor, comme Césaire, poètes et humanistes, prônent un retour aux sources africaines et se font les chantres de la « négritude » et du métissage culturel.

...A présent, nous voici entrant de plain-pied au début de la décennie 30, où à Paris, se rencontrait assez souvent trois condisciples, devenus au long des années, quasiment inséparables : un Blanc, un Jaune et un Noir.

Le blanc c'était Georges Pompidou (1911-1974), le jaune Pham Duy Khiêm (1907-1974) et le noir Léopold Sédar Senghor (né à Joal en 1906).


Ils venaient de trois mondes différents pour se rencontrer à Khâgne, avec comme itinéraire l 'Ecole Normale Supẻrieure de la rue d'Ulm, au coeur de Paris même. Ils avaient à peu près le même âge et s'engageaient tous dans la même voie : celle de la Culture et de l'Affranchissement des Peuples.
Alors que POMPIDOU venait de Cajarc, quelque part dans le Massif Central de la Prance, KHIEM venait de quitter Hanoi (étymologiquement : Mésopotamie), haut-lieu de l'histoire du peuple vietnamien, SENGHOR lui, venait du Sénégal des Sérères d'Afrique Occidentale.
De prime abord, POMPIDOU se sentait poussé par vocation humanitariste, vers ses deux condisciples de couleur qui représentaient grosso modo deux mondes déshérités. Ils les considéraient d'emblée comme des frères, dans cette vaste Communauté francophone, nourrie des mêmes idéaux de liberté, d'authenticité et d'humanisme.


Les Condisciples en Khâgne du Lycée Louis Le Grand, PHAM Duy Khiêm, Georges POMPIDOU, Léopold Sédar SENGHOR.

Leurs études une fois sanctionnées par l'agrégation, dont une de lettres, et deux de grammaires (dont un obtenu hors de la rue d'Ulm), chacun rentrait dans son pays natal pour accomplir une vocation première: l'enseignement. Puis, de là chacun vira tant soit peu dans la politique.
Homme de coeur avant tout, POMPIDOU fraternisait avec ses deux condiciples de couleur, leur insufflant cet esprit d'émancipation que ceux-ci s'ingéniaient à compléter à qui mieux mieux par une volonté d'affirmation de l'identité nationale et la promotion des valeurs ancestrales qu'il appartenait à chacun d'enrichir et d'harmoniser au contact des peuples. Ce fut dans cet esprit qu'un peu plus tard, SENGHOR, le chantre inspiré de l'Afrique Noire avec ses ''Ethiopiques'' se fit le défenseur acharné de la Négritude et de la Créolité, naguère inventée par Aimé CESAIRE (1913-2008), député-maire de Fort de France depuis plusieurs décennies. Dans le même temps, POMPIDOU, quant à lui, milita pour la francité en élaborant une Anthologie de la Poésie Francaise, cependant que Pham Duy Khiem fit promouvoir la vietnamité à travers ses ''Légendes des Terres Sereines'', qui obtint le Premier Prix Littéraire d'Indochine en 1942.
La politique, avec ses facettes mirobolantes, devait conduire SENGHOR d'abord, POMPIDOU ensuite, aux charges suprêmes de l'Etat, alors que KHIEM, le grammairien rigoriste de réputation, se complaisait dans le Professorat, à l'exception d'un bref passage en 1955 au Secrétariat d'Etat à la Présidence du Conseil du Gouvernement de Saigon, qu'il quitta définitivement en 1956 pour assumer pendant quelques années, et sans enthousiasme, les fonctions d'Ambassadeur du Vietnam en France.
Négrité et Créolité. Vietnamité et Francité, autant de néologismes qui firent depuis un demi-siècle et même plus, leur apparition en ce monde, avec comme toile de fond le baobab sénégalais, le vanillier réunionnais, le bambou vietnamien et le peuplier de France, lesquels, ensemble ou séparément, résistent à tous les vents perturbateurs, tel un défi permanent qui chante au rythme de l' univers. . .

Commentaires

Quel beau billet!

"Le crayon de Dieu lui-même n'est pas sans gomme"
Aimé Césaire

Ecrit par : Une sotte | 20.02.2009

Un bien beau texte que celui-ci...

C'est le genre d'histoire qui (osons le dire), donne une certaine fierté d'être français. Mais une fois la fierté passée, nous fait surtout prendre conscience que meme le plus humble d'entre-nous est en quelque sorte dépositaire d'une petite partie de cette pensée si univelle et éclairée.

C'est aussi le genre de texte qui developpe des idées que je souhaiterai voir plus souvent mises en avant. Et, lorsque je lis cela, je suis plus que jamais convaincu que la beauté et l'intelligence rassemble les peuples et les aident à s'afranchir de la servitude.

Ecrit par : Garennois | 21.02.2009

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